Anne Marie : C'est le printemps

Publié le par Sonia

 

 

ETEIGNEZ VOS TELES 2

 

 

 

Le réveil a sonné: à moitié endormi j'ai poussé les volets.

On avait écrit quelque chose sur le mur d'en face, j'ai plissé les yeux...

c'est le printemps'...

merci, je suis au courant!

.éteignez vos télés'...

ah bon! J'ai pas de télé c'est un truc de vieux cet engin.

Moi j'ai mon smart'

...venez dans la rue...

J'hallucine! Ya personne dans la rue à cette heure là.

 

Qui? mais qui donc a pu écrire cette ânerie? Ca m'a énervé.

Je me disais: je suis là tranquille en train de roupiller pendant qu'il y a un guss qui traficote

sur le mur d'en face.

J'ai bien regardé: oui, juste au dessus de la bouche d'incendie des lettres attachées, pas de fote d'ortografe, c'est quelqu'un qui sait bien écrire

Je ne vois pas dans la rue qui a pu faire ça?

Les gars de la bande? Ben non, ils n'ont pas de télé eux non plus.

 

La mamie du 3 ?

Celle là elle est branchée jour et nuit sur son poste, à fond la caisse, elle est sourdingue.

Quand il fait beau, elle laisse sa porte ouverte et toute la rue est obligée de subir

les insipides borborygmes de sa télé.

Et puis elle est bien trop petite, la vieille, il lui faudrait un escabeau pour écrire aussi haut.

 

Tiens, ça me fait penser: le gars du bâtiment, en face, lui il est grand et costaud et question peinturlure, il en connait un rayon. Et lui, il a des bombes de peinture sous la main

pour ses chantiers...

Ouais mais il parle pas français...

 

Je suis allé le voir, le voisin, personne ne lui parle jamais, il cause ukrainien, ou roumain ou slovaque un jargon comme ça, c'est tout pareil.

Il m'a offert un verre de truc qui t'arrache les amygdales et il m'a raconté dans un sabir bizarre ce qu'il avait fait cette nuit.

La télé de la vieille, il ne pouvait plus l'encaisser.

Alors avec un copain du chantier ils lui ont tracé ce message, sur le mur en face juste devant sa porte. On a bien rigolé tous les deux et un peu bu aussi...

 

Quand je suis sorti, la vieille avait ouvert sa porte et branché sa télé à fond.

Sourde, peut être, mais pas aveugle: je lui ai montré le tag.

Elle a tout de suite compris.

La mamie de la rue a  éteint sa télé. Elle a sorti sa vieille chaise en paille et s'est installée devant sa porte.

Les voisins étonnés lui souriaient gentiment.

Dans la journée, d'autres ont fait comme elle, on a bu le thé, ou l'apéro, les gamins du jus d'orange...

Du coup le soir dans la rue  tout le monde s'est parlé, on ne se connaissait même pas...

 

 
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